Biographie
Victor HUGO 1802-1885
Né à Besançon le 26 février 1802, mort à Paris le 22 mai 1885. Figure
littéraire hors pair, Victor Hugo est, très jeune, attiré par la poésie
et la gloire liée à l'écriture ; ses premiers succès lui apportent la
célébrité. Poète, romancier, auteur dramatique, engagé politiquement
(son roman le Dernier jour d'un condamné en est le prélude en 1829),
exilé sous le Second Empire, ce génie traverse son époque, la marquant
par sa vitalité, ses combats, ses convictions et son immense talent.
Son
œuvre poétique est marquée notamment par les Odes et ballades (1828),
les Châtiments (1853), les Contemplations (1856) et la Légende des
siècles (1859 à 1883), comme son œuvre romanesque est dominée par
Notre-Dame de Paris (1831) et les Misérables (1862). Après la préface
manifeste de Cromwell, Victor Hugo entre de façon fracassante dans le
milieu du théâtre du début du XIXe siècle avec Hernani (1830) et la
célèbre bataille au moment de la création à la Comédie-Française. Hugo
est alors le chef de file incontesté de l'école romantique.
Dans
l'écriture de ses drames, passion et politique sont des forces qui
s'entrechoquent, et les fulgurances de l'action dramatique révèlent aux
cœurs purs la seule voie, funeste et héroïque, qui leur est ouverte. La
décennie suivante voit la présentation sur scène de ses drames, Le roi
s'amuse (1832), interdite après la création, Lucrèce Borgia (1833),
Marie Tudor (1833), Angelo, tyran de Padoue (1835), Ruy Blas et Marion
Delorme (1838), jusqu'à l'échec des Burgraves en 1843. À la fin de sa
vie, Victor Hugo reviendra au théâtre avec l'écriture de plusieurs
pièces, dont la série du « Théâtre en liberté ».
Fiche pratique
Auteur : Victor Hugo
Titre et date de publication: Le dernier jour d'un condamne , publié en 1829.
Genre : Récit à la première personne ; adoption des techniques de l’autobiographie, le journal intime en particulier.
Histoire :
Le livre est l’histoire d’un homme qui a été condamné a mort et, il
raconte ce qu’il vit pendant les dernières semaines de sa vie. Nous ne
savons ni le nom de cet homme ni ce qu’il a fait pour être condamné à
mort, mais nous pouvons comprendre et vivre avec cet homme ce que veut
dire être condamnés à mort. Il nous raconte sa vie en prison ; nous
parle de ses sentiments ; peurs et espoir, de sa famille ; sa fille, sa
femme et sa mère. Il raconte aussi quelques bribes de son passé et cesse
d’écrire quand arrive le moment de l’exécution.
Composition :
Le livre comporte trois parties : Bicêtre, la Conciergerie et la
Mairie. Bicêtre : le procès, le ferrage des forçats et la chanson ; La
Conciergerie : le voyage vers Paris, la rencontre avec la friauche et la
rencontre avec le geôlier qui lui demande les numéros pour jouer à la
loterie ; L’Hôtel de Ville : le voyage dans Paris, la toilette du
condamné et le voyage vers la Place de Grève : l’échafaud.
Personnages : Le condamné à mort / Les geôliers / Sa fille / Sa femme et sa mère / Le prêtre. / La foule
Cadre:
Lieux : Les grandes prisons de Paris : Bicêtre, la Conciergerie et l’Hôtel de Ville.
Durée : Cinq semaines, à partir du moment où le protagoniste est condamné à mort jusqu’au moment où il monte sur l’échafaud.
Thèmes : La peine de mort / La peur / la haine / la religion / la violence contre les prisonniers / l’injustice / la justice
Enonciation, focalisation :
Le narrateur est le personnage : utilisation de la première personne.
Le narrateur # l’auteur. Focalisation interne : accès au point de vue du
narrateur et à sa vision des choses et du monde..
Le schéma narratif du récit:
Situation initiale:
Le personnage-narrateur menait une vie heureuse avec sa famille, sa
fille Marie, sa femme et sa mère jusqu'au jour du crime qui a bouleversé
sa vie.
NB:
Le récit commence in medias res c'est-à-dire le moment où l'action est
déjà engagée. Puisque le plus important est la contestation de la peine
de mort, l'auteur fait ellipse de cette situation initiale et passe
directement aux faits. Toutefois il nous est facile de déduire cette
situation initiale à travers les flashes back. (Analepses, retour en
arrière).
Elément perturbateur: Le meurtre commis par le narrateur-personnage.
Péripéties: Le jugement, l'emprisonnement, la condamnation à la peine de mort, recherche du condamné d'une solution pour préserver sa vie.
Dénouement:
Il n'y a pas de dénouement. Le condamné garde l'espoir jusqu'à quelques
moments avant l'exécution, mais à ce moment-là les bourreaux préparent
l'exécution. C'est une clausule ouverte, aux lecteurs d'imaginer la fin
puisque pour l'auteur ce qui compte c'est la dénonciation de l'horrible
peine de mort.
Situation finale: L'auteur a fait l'ellipse de la situation finale pour amener le lecteur à réfléchir.
Résumé de l'oeuvre
CHAPITRE1
Depuis cinq semaines, un jeune prisonnier vit constamment avec l’idée
de la mort. Il est doublement enfermé. Physiquement, il est captif dans
une cellule à Bicêtre. Moralement, il est prisonnier d’une seule idée :
condamné à mort. Il se trouve dans l’impossibilité de penser à autre
chose.
CHAPITRE2
De sa cellule, le narrateur se souvient de son procès et de sa
condamnation à mort. Il relate les circonstances de son procès et sa
réaction au verdict fatal.
CHAPITRE3
Le condamné semble accepter ce verdict. Il ne regrette pas trop de
choses dan,s cette vie où tous les hommes sont des condamnés en sursis.
Peu importe ce qui lui arrive.
CHAPITRE4 Le condamné est transféré à Bicêtre. Il décrit brièvement cette hideuse prison.
CHAPITRE5
Le narrateur nous parle de son arrivée à la prison. Il a réussi à
améliorer ses conditions de prisonnier grâce à sa docilité et à quelques
mots de latin. Il nous parle ensuite de l’argot pratiqué en prison.
CHAPITRE6
Dans un monologue intérieur, le prisonnier nous dévoile sa décision de
se mettre à écrire. D’abord, pour lui-même pour se distraire et oublier
ses angoisses. Ensuite pour ceux qui jugent pour que leurs mains soient
moins légères quand il s’agit de condamner quelqu’un à mort. C’est sa
contribution à lui pour abolir la peine capitale.
CHAPITRE7 Le narrateur se demande quel intérêt peut-il tirer en sauvant d’autre têtes alors qu’il ne peut sauver la sienne.
CHAPITRE8
Le jeune condamné compte le temps qui lui reste à vivre. Six semaines
dont il a déjà passé cinq ou même six. Il ne lui reste presque rien.
CHAPITRE9
Notre prisonnier vient de faire son testament. Il pense aux personnes
qu’il laisse derrière lui : sa mère, se femme et sa petite fille. C’est
pour cette dernière qu’il s’inquiète le plus.
CHAPITRE10
Le condamné nous décrit son cachot qui n’a même pas de fenêtres. Il
décrit aussi le long corridor longé par des cachots réservés aux forçats
alors que les trois premiers cabanons sont réservés aux condamné à la
peine capitale.
CHAPITRE11
Pour passer sa longue nuit, il se lève pour nous décrire les murs de sa
cellule pleins d’inscriptions, traces laissées par d’autres
prisonniers. L’image de l’échafaud crayonnée sur le mur le perturbe.
CHAPITRE12
Le prisonnier reprend sa lecture des inscriptions murales. Il découvre
les noms de criminels qui ont déjà séjourné dans cette triste cellule.
CHAPITRE13
Le narrateur- personnage se rappelle d’un événement particulier qui a
eu lieu il y a quelques jours dans le cour de la prison : le départ des
forçats au bagne de Toulon. Il nous rapporte cet événement comme un vrai
spectacle en trois actes : la visite médicale, le visite des geôliers
et le ferrage. Il nous parle du traitement inhumain réservé à ces
condamnés. A la fin du spectacle, il tombe évanoui.
CHAPITRE14
Quand il revient à lui, il se trouve dans l’infirmerie. D’une fenêtre ,
il peut observer les forçats partir tristement sous la pluie au bagne
de Toulon. Il préfère plutôt la mort que les travaux forcés.
CHAPITRE15
Le prisonnier est dans sa cellule. Il avait senti un peu de liberté
dans l’infirmerie mais voilà qu’il est repris par l’idée de la mort
qu’il pense à s’évader.
CHAPITRE16
Le narrateur se rappelle de ces quelques heures de liberté à
l’infirmerie. Il se souvient de cette jeune fille qu’il a entendu
chanter de sa vois pure, veloutée une chanson en argot.
CHAPITRE17
Il pense encore à s’évader. Il s’imagine déjà en dehors de la prison
dans le port pour s’embarquer vers l’Angleterre mais voilà qu’un
gendarme vient demander son passeport : le rêve est brisé
CHAPITRE18 Il est six heures du matin. Le guichetier entre dans le cachot. Il demande à notre condamné ce qu’il désire à manger.
CHAPITRE19
Le directeur de la prison vient en personne voir le condamné. Il se
montre doux et gentil. Le jeune comprend que son heure est arrivée.
CHAPITRE20 Le narrateur pense à son geôlier, à la prison qu’il trouve partout autour de lui, dans les murs, dans les guichetiers…
CHAPITRE21
Le condamné reçoit deux visites. D’abord celle du prêtre et puis celle
de l’huissier. Ce dernier vient lui annoncer que le pourvoi est rejeté
et que son exécution aura lieu le jour même place de Grève. Il reviendra
le chercher dans une heure.
CHAPITRE22
Le prisonnier est transféré à la Conciergerie. Il nous conte le voyage
et sa discussion avec le prêtre et l’huissier pendant le trajet. Il se
montre peu bavard et parait plutôt pensif. A huit heures trente, la
carriole est déjà devant la Cour.
CHAPITRE23
L’huissier remet le condamné aux mains du directeur. Dans un cabinet
voisin, il fait une rencontre curieuse avec un condamné à mort qui
séjournera dans la même cellule à Bicêtre. Ce dernier, fils d’un ancien
condamné à mort lui raconte son histoire et s’empare de sa redingote .
CHAPITRE24 Le narrateur est enragé parce que l’autre condamné lui a pris sa redingote.
CHAPITRE25
Le condamné est transféré dans une autre cellule. On lui rapporte, sur
sa demande une chaise, une table, ce qu’il faut pour écrire et un lit.
CHAPITRE26
Il est dix heures. Le condamné plaint sa petite fille qui restera sans
père. Elle sera peut être repoussée, haie à cause de lui.
CHAPITRE27 Le narrateur se demande comment on pouvait mourir sur l’échafaud.
CHAPITRE28 Il se rappelle avoir déjà vu une fois monter une guillotine sur la place de Grève.
CHAPITRE29
Le jeune détenu pense à cette grâce qui ne vient toujours pas. Il
estime maintenant que les galères seraient meilleure solution en
attendant qu’un jour arrive la grâce.
CHAPITRE30
Le prêtre revient voir le condamné. Celui-ci est loin d’apprécier sa
présence. Ce prêtre parle machinalement et semble peu touché par la
souffrance du prisonnier. Ensuite, et bien que la table soit délicate et
bien garnie, il ne peut manger.
CHAPITRE31
Le narrateur est surpris de voir un homme prendre les mesures de la
cellule. Ironie du sort : la prison va être rénovée dans six mois.
CHAPITRE32
Un autre gendarme vient prendre la relève. Il est un peu brusque. Il
demande au prisonnier de venir chez lui après son exécution pour lui
révéler les trois bons numéros gagnants à la loterie . Le condamné veut
profiter de cette demande bizarre : il lui propose de changer ses
vêtements avec lui. Le gendarme refuse ; il a compris que le prisonnier
veut s’évader.
CHAPITRE33
Pour oublier son présent, le narrateur passe en revue ses souvenirs
d’enfance et de jeunesse.Il s’arrête longuement sur le souvenir de Pepa,
cette jeune andalouse dont il était amoureux et avec qui il a passé une
belle soirée d’été.
CHAPITRE34
Au milieu de ses souvenirs de jeunesse, le condamné pense à son crime.
Entre son passé et son présent, il y a une rivière de sang : le sang de
l’autre ( sa victime) et le sien( le coupable)
CHAPITRE35 Le narrateur pense à toutes ces personnes qui continuent toujours à vivre le plus normalement au monde.
CHAPITRE36 Il se rappelle ensuite du jour où il est allé voir la grande cloche (le bourdon) de Notre-Dame (cathédrale à Paris)
CHAPITRE37 Le narrateur décrit brièvement l’hôtel de ville.
CHAPITRE38
Il est une heure le quart. Le condamné éprouve une violente douleur. Il
a mal partout. Il lui reste deux heures quarante cinq à vivre.
CHAPITRE39
On dit que sous la guillotine, on ne souffre pas, que cela passe vite.
Le narrateur se demande comment on peut savoir une telle chose puisque
aucun condamné déjà exécuté ne peut l’affirmer.
CHAPITRE40
Le jeune détenu pense au roi. C’est de lui que viendrait la grâce tant
attendue. Sa vie dépend d’une signature. Il espère toujours.
CHAPITRE41 Le condamné se met dans la tête l’idée qu’il va bientôt mourir. Il demande un prêtre pour se confesser, un crucifix à baiser
CHAPITRE42
Il se laisse dormir un moment. C’est son dernier sommeil. Il fait un
cauchemar et se réveille frémissant, baigné d’une sueur froide.
CHAPITRE43
La petite Marie vient rendre visite à son père. Ce dernier est choqué
devant la fraîche et la belle petite fille qui ne le reconnaît pas. Elle
croit que son père est mort. Le jeune condamné perd tout espoir.
CHAPITRE44 Le détenu a une heure devant lui pour s’habituer à la mort. La visite de sa fille l’a poussé dans le désespoir.
CHAPITRE45
Il pense au peuple qui viendra assister au « spectacle » de son
exécution. Il se dit que parmi ce public enthousiaste, il y a peut-être
des têtes qui le suivront , sans le savoir, dans sa fatale destination.
CHAPITRE46
La petite Marie vient de partir. Le père se demande s’il a le temps de
lui écrire quelques pages. Il cherche à se justifier aux les yeux de sa
fille.
CHAPITRE47
Ce chapitre comporte une note de l’éditeur : les feuillets qui se
rattachent à celui-ci sont perdus ou peut être que le condamné n’a pas
eu le temps de les écrire
CHAPITRE48
Le condamné est dans une chambre de l’hôtel de ville. A trois heures,
on vient l’avertir qu’il est temps. Le bourreau et ses deux valets, lui
coupent les cheveux et le collet avant de lier ses mains. Le convoi se
dirige ensuite vers la place de Grève devant une foule de curieux qui
attendent l’exécution.
CHAPITRE49
Le condamné demande sa grâce à cette personne qu’il croyait juge,
commissaire ou magistrat. Il demande, par pitié, qu’on lui donne cinq
minutes pour attendre la grâce. Mais le juge et le bourreau sortent de
la cellule. Il reste seul avec le gendarme. Il espère encore mais voilà
qu’on vient le chercher…
Questionnaire
Le dernier jour d'un condamné est
l’un des premiers écrits par Victor Hugo. Dans sa préface il nous dit
son souhait d’écrire un « plaidoyer contre la peine de mort » Pour ce
faire, il donne la parole à un condamné, qui sait qu’il va mourir. Ce
dernier ne cherche pas à rejeter la faute qu’il a commise, il ne se
révolte pas… il vit, seconde après seconde, les moments qui le séparent
de sa mort Victor Hugo lui donne la parole : et nous entendons, nous
voyons, nous ressentons ce que le condamné entend, voit, ressent. Le
point de vue interne joue à merveille, on se sent proche de cet homme ;
on s’identifie à lui… on ne peut pas supporter de savoir que dans
quelques heures, il va mourir et l’on éprouve un grand deuil quand les
mots ne s’écrivent plus, quand la plume n’a plus de main pour la tenir.
Magnifique et grandiose écriture que celle de Victor Hugo dans ce
monologue intérieur : les procédés d’emphase, les effets surprenants de
personnification, les gradations… quelle plaidoirie !
1.
Quel est le narrateur de ce roman ? à quelle personne est-il écrit ?
Comment appelle-t-on ce point de vue ? Quelles sont les conséquences
(sur le lecteur) de cette façon de raconter les choses ? A quel type de
caméra cela correspond-il au cinéma ?
2.
Expliquez pourquoi on ne peut pas nommer cette œuvre : · Une
autobiographie ? · Une confession ? · Un journal intime ? · Une lettre ?
· Des mémoires ?
3. Le personnage : ·
Sur ce qu’on apprend de lui, de ses façons de se conduire…, peut-on
dire qu’il est : cultivé/ ignare/grossier/ pauvre ? vous appuierez votre
réponse en citant un bref extrait · Quelles sont ses relations avec les
autres prisonniers qu’il rencontre ? · Quels sont ses souvenirs
(extraits) sur son enfance/ les femmes/ sa femme/ · Quelles pensées
a-t-il envers son enfant ?
4. le
crime: Par quels moyens Victor Hugo parvient-il à ne pas nous révéler
les actes du condamné ? · quand il aurait pu en parler ( au procès,
ch.2) · à cause de l’état psychologique du condamné · par un artifice
romanesque
EVALUATION
Chapitre premier
Voilà
cinq semaines que j'habite avec cette pensée, toujours seul avec elle,
toujours glacé de sa présence, toujours courbé sous son poids !
Autrefois,
car il me semble qu'il y a plutôt des années que des semaines, j'étais
un homme comme un autre homme. Chaque jour, chaque heure, chaque minute
avait son idée. Mon esprit, jeune et riche, était plein de fantaisies.
Il s'amusait à me les dérouler les unes après les autres, sans ordre et
sans fin, brodant d'inépuisables arabesques cette rude et mince étoffe
de la vie. C'étaient des jeunes filles, de splendides chapes d'évêque,
des batailles gagnées, des théâtres pleins de bruit et de lumière, et
puis encore des jeunes filles et de sombres promenades la nuit sous les
larges bras des marronniers. C'était toujours fête dans mon imagination.
Je pouvais penser à ce que je voulais, j'étais libre.
Maintenant
je suis captif. Mon corps est aux fers dans un cachot, mon esprit est
en prison dans une idée. Une horrible, une sanglante, une implacable
idée ! Je n'ai plus qu'une pensée, qu'une conviction, qu'une certitude :
condamné à mort !
Quoi que je fasse,
elle est toujours là, cette pensée infernale, comme un spectre de plomb
à mes côtés, seule et jalouse, chassant toute distraction, face à face
avec moi misérable, et me secouant de ses deux mains de glace quand je
veux détourner la tête ou fermer les yeux. Elle se glisse sous toutes
les formes où mon esprit voudrait la fuir, se mêle comme un refrain
horrible à toutes les paroles qu'on m'adresse, se colle avec moi aux
grilles hideuses de mon cachot ; m'obsède éveillé, épie mon sommeil
convulsif, et reparaît dans mes rêves sous la forme d'un couteau.
Je
viens de m'éveiller en sursaut, poursuivi par elle et me disant : Ah !
ce n'est qu'un rêve ! - Hé bien ! avant même que mes yeux lourds aient
eu le temps de s'entre ouvrir assez pour voir cette fatale pensée écrite
dans l'horrible réalité qui m'entoure, sur la dalle mouillée et suante
de ma cellule, dans les rayons pâles de ma lampe de nuit, dans la trame
grossière de la toile de mes vêtements, sur la sombre figure du soldat
de garde dont la giberne reluit à travers la grille du cachot, il me
semble que déjà une voix a murmuré à mon oreille : - Condamné à mort !
Mise en situation:
Il
s'agit de l'incipit. Qui est le personnage principal de l'œuvre? Pour
quel crime est-il condamné? Pourquoi l'auteur s'est contenté de quelques
informations ?
Analyse:
1)
Quel est le genre de ce texte? 2) Quel est son type? 3) Quelle est la
visée de l'auteur? 4) S'agit-il d'un discours ou d'un récit? 5) Qui
parle dans ce passage? A qui? De quoi? Où? Quand? 6) Quelle idée obsède
l'esprit du narrateur? Relevez le portrait de cette idée?(tableau) 7)
Quelle est donc le point de vue de la narration? 8) Relevez les
indicateurs temporels et les temps verbaux et dégagez l'opposition
autour de laquelle le texte est construit. 9) Relevez les champs
lexicaux dominants dans ce passage. Comment servent-ils cette
opposition? 10) Dites en quoi cet incipit remplit-il sa fonction
informative?
Traces écrites:
Il
s'agit d'un roman à thèse où l'auteur dénonce la peine de mort. Le
texte est un récit qui s'apparent à un discours. En effet, le narrateur
s'adresse à lui-même; c'est un monologue intérieur. Le narrateur étant
lui-même le personnage principal, le texte est à la première personne
avec une focalisation intérieur qui nous permet de vivre avec ce pauvre
condamné ses derniers jours attendant l'exécution. Une idée préoccupe
l'esprit du narrateur sa condamnation à mort. Cette idée l'obsède, il la
décrit comme une femme qui le secoue avec ses deux mains d'où la
personnification. Le texte est riche en termes appartenant au champ
lexical "la prison".
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